• Valse d'illusions

       Le crépuscule se lève, l'indolente valse entame son dernier rituel tandis que les faisceaux bleutés tournoient entre les branchages et se réfléchissent sur un lac phosphorescent. La symphonie de la brise d'été accompagne les halos bordant le feuillage des saules pleureurs jusqu'à la terre parsemé de myosotis. Devant un tel spectacle ma vue se perd dans l'immensité de la farandole naturelle de la forêt, je distingue ces arbres, leurs branches semblent emporter des cordes argentées qui luisent dans l'obscurité naissante, elles effleurent mon visage enveloppant mon être.

       Une silhouette sombre et brumeuse interrompt brusquement la paisible valse. Depuis combien de temps est-elle là ? M'observe t-elle depuis le début ? Depuis combien de temps suis-je ici ? La forêt s'assombrit, la chevelure autrefois d'un saphir profond devient ébène. La masse s'approche, ma vue est sibylline, tout est trouble pourquoi ? Est-ce mes larmes ? Je le sens, ce danger imminent, il faut le fuir. La pluie commence à tomber, le vent glacial se lève et s'engouffre dans ma chair. Je me lève, mais c'est impossible, je suis entravé par le saule. Une peur bleue m'envahit, la créature entame son avancée. Mon corps se raidit sur le siège grisâtre, je me débats comme un beau diable, à en avoir des ecchymoses sur les bras tailladant au passage ma joue.

       Elle me fixe, je le sais, ses pas s'enfoncent dans la bourbe puis se relèvent emmenant avec eux une visqueuse substance semblable à des crocs sanguinolents, chaque pas transforme l'environnement en une terre meurtrie et desséchée. Un cri lugubre sort de ce monstre noir, il rentre jusqu'au plus profond de mes entrailles. Peu à peu ma respiration devient saccadée, je cesse de me débattre contre cette chaîne me brûlant la poitrine. Ce cauchemar est réel, impossible de fuir, est-ce ma dernière heure ? La masse sombre se rapproche, des hurlements stridents se lèvent, ils prennent de plus en plus de place dans mon crâne, sous la crainte et la douleur je ferme les yeux, pensant me réveiller d'un mauvais rêve. C'est un vrai capharnaüm, ces bruits à peine perceptibles sont un fléau, mais une voix claire et distincte m'interpelle : « M'entendez- vous ? » Qui parle ? La créature ? Mon sauveur ? Non, impossible, je me suis aventuré ici seul comme à mon habitude, après un verre je sors afin de m'aérer l'esprit. Mes yeux restent clos sous la terreur, je tente de répondre la gorge nouée, cependant seul un gémissement presque inaudible en sort « A..l...th...a ».

       Je sombre lentement dans l'obscurité la plus totale, une seconde semble une éternité, mon corps se refroidit jusqu'à en être gelé. Je me laisse border par les ténèbres, plus aucune peur ne m'envahit, seulement une sensation douce et glaciale qui coule dans mes veines.

       Une lueur rubis jaillit dans ces ténèbres, elle s'illuminait, réchauffait mais elle s'épuisait laissant gagner le néant si sombre et froid. Il faut que j'atteigne au plus vite cette lumière, mon salut. Une chaleur foudroyante transperça mon corps meurtri, ravivant chaque membre endolori. Un écho me parvient « Sortez-le de là ! » et un « Il est conscient ! » . Je me souviens maintenant, dans les méandres de ma mémoire. Une aveuglante lumière bleue, la danse macabre, la vitesse, l'accident, la peur, le noir, la douleur. Ces souvenirs encore opaques me révèlent ce qui s'est passé. Mon réveil est douloureux, je me retrouve couché, sur quelque chose de dur... un brancard ? Prenant mon courage à deux mains je lance :

    « Où suis-je ?
    _ Dans l'ambulance, nous vous amenons à l'hôpital après votre l'accident de voiture. »

     Je le savais, je n'aurai pas du prendre ce curaçao avant de prendre le volant.

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